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Commentaire de Jacques Berne

Comment Christiane Douheret préférerait-elle que nous regardions ses tableaux ?

Aussi simplement qu'elle nous les montre, comme des témoignages de son amour de la peinture, celle dont il a été dit qu'elle était "la nourriture même de la peinture". Sans glose ni interprétation qui prennent trop souvent une pente littéraire parasite !

Le plus simple à dire de ses travaux, c'est que Christiane Douheret procède par empâtements colorés où se ressent la vive jouissance qui est la sienne de manier matière et matériau dont elle use généreusement, sans y tracer des signes reconnaissables, les obligeant à figurer les âges très anciens de la Création dont elle seule se souviendrait.

Coeur de jade

Que Christiane Douheret expose ses toiles, n'est-ce pas en effet, de sa part, consentir à l'usage que peuvent en faire notre imagination et notre invention ?

D'y voir, par exemple, une cosmogonie à l'oeuvre ? C'est l'un des fils à suivre pour s'aventurer dans les paysages de Christiane Douheret. Des représentations de sites certes peu définis, livrés qu'ils sont à des forces primordiales, comme des prises de vue instantanées des phases d'un enfantement tellurien. Des images qui pourraient servir à illustrer le roman d'une genèse.

Les forces séminales des origines. La surrection d'une mise en ordre du chaos élémentaire.

Sont-ce des forces célestes, terrestres ou maritimes ? Elles sont indiscernables les unes des autres comme elles se confondaient dans ces ères où régnait l'indifférenciation du tohu et du bohu.

Aucune créature d'ailleurs n'est encore présente pour les distinguer et donc les dénommer.

Nous nous trouvons dans les temps d'avant le temps, le temps des idôles, d'avant les dieux et, bien sûr, d'avant les hommes.

Et la mer s'y brise
[Collection privée]

Le Verbe semble-t-il a vaincu les ténèbres, le langage sera pour plus tard. Ce monde en gésine se tait, car le silence de ces tableaux impressionne autant qu'impressionneraient leurs cris s'il y avait quelqu'un pour les entendre.

D'où Christiane Douheret tient-elle de pareilles visions ? Est-ce bien elle qui est allée à leur rencontre, ou bien ne sont-ce pas, comme malgré elle, ces visions qui l'ont rencontrée ?

La naissance du monde

Voici un ouvrage de dame ("les peintresses" disait Apollinaire) dont la vigueur, la gravité et l'autorité surprendraient ceux qui oublieraient que les anciens vénéraient en Gaia la Terre-Mère qui présidait aux naissances.

C'est dans ses grands formats sans doute que Christiane Douheret donne libre cours à son emportement créatif. Il ne faudrait pourtant pas négliger ses toiles de petit format où apparaissent, les forces s'étant rassises, des paysages plus reconnaissables.

Déjà une Nature qui nous est plus familière commence à s'y ressembler à elle-même.

Où s'annoncent, comme en attente, déserts encore, les lieux enfin habitables promis à l'homme.

 

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